À vous la parole : David Demougeot, directeur artistique du Festival Bien Urbain

12 fév 2024

En 2024, le Festival Bien Urbain s’associe à la Révélation Art urbain, prenant la suite du Palais de Tokyo. Son directeur artistique revient sur la singularité de ce festival et sa vision de l’art urbain.

Entretien paru dans l'Esquisses n°34 (janvier 2024) 

 

Quel est le principe du Festival Bien Urbain ? 

Au départ, il y a l’association Juste Ici créée en 2011 pour inviter les artistes à œuvrer dans l’espace public à Besançon. La première action que nous avons portée est le Festival Bien Urbain : nous voulions proposer des créations originales parce que contextuelles et pertinentes. Le Festival est « dans et avec » l’espace public : chaque œuvre est créée in situ et en rapport avec son contexte. Pour nous, la ville n’est pas un lieu de monstration, c’est véritablement un lieu de vie et l’œuvre s’insère dans un quotidien préexistant.

Rapidement, on nous a proposé d’organiser des ateliers d’éducation artistique, et nous nous sommes également intéressés à des projets dits de « territoire » à l’échelle d’un quartier. Cela permet d’avoir le festival sur une période donnée et des projets d’actions culturelles tout au long de l’année. 

Comment se renouvelle-t-on dans l’espace public au bout de onze éditions ? 

Les artistes font preuve de créativité et les projets sont très diversifiés : dans un même espace trois artistes vont avoir trois propositions très différentes et cela devient passionnant. La dimension contextuelle ouvre des pistes inépuisables, on découvre dans sa propre ville des choses que l’on n’avait jamais vues. Et les œuvres sont prévues comme éphémères, c’est l’idée de départ : certaines disparaissent très vite, d’autres prennent la forme d’aménagements du territoire car cela provoque des usages, et l’œuvre est gardée en l’état. L’espace public est intense et évolutif.

Avec un espace public très règlementé, comment l’art urbain arrive-t-il à déployer sa singularité ? 

Nous ne parlons jamais d’art urbain pour le Festival, mais bien d’art dans l’espace public : certains artistes invités n’ont jamais eu de lien avec l’art urbain, le graffiti ou le street art. Nous ne faisons pas de hiérarchie entre art urbain ou art contemporain. 

Je parle d’art urbain lorsqu’il est produit sans autorisation. C’est très personnel et je sais que cette définition fait débat, y compris au sein même de la Fédération de l’art urbain, mais selon moi ce qui fait sa singularité, c’est précisément l’indépendance et l’absence d’autorisation. 

Certains projets de notre festival relèvent de l’art urbain : par exemple lorsque Mary et Jiem réalisent 300 mini-peintures sur le mobilier urbain ou quand OX colle des affiches sur des supports publicitaires 4x3m. Cela n’a artistiquement pas de sens et n’est pas utile de demander l’autorisation, nous pouvons en revanche prévenir en amont nos partenaires. 

C’est ce qui va vous intéresser dans la Révélation Art urbain ? 

Tout à fait. Travailler sur la dimension indépendante des artistes. Valoriser cette liberté. Être associé à la Révélation, c’est d’abord mettre en valeur des œuvres ou séries d’œuvres déjà réalisées. Pas forcément à Besançon donc. Nous aiderons les artistes à trouver une manière de montrer ces projets, à diffuser leurs œuvres, dans la validation d’un parcours jeune, mais déjà établi. 

En art urbain, il y a très peu d’espaces, institutionnels ou associatifs, qui font ce travail. Il y a également un manque dans le soutien pour produire de la documentation, des expositions. C’est à cet endroit que nous avons envie de nous situer pour cette Révélation. 

Que signifient pour vous les droits d’auteur ? 

C’est pour nous une question de respect mais aussi de rémunération. Nous faisons toujours attention à la rémunération des artistes dans nos contrats, en cohérence avec nos budgets. Nous sommes signataire de la Charte Économie solidaire de l’art. En découvrant la quasi absence de rémunération des artistes dans les arts visuels j’ai été très étonné par ces pratiques. Cela vient peut-être aussi de mon parcours : je travaillais dans la musique auparavant, où la question ne se pose même pas. Les artistes visuels sont rarement aidés pour produire leurs œuvres, leur diffusion peut alors occasionner des droits et une rémunération. 

Depuis quelques années, il y a de plus en plus de membres de l’ADAGP parmi les artistes avec qui on travaille et le droit d’auteur devient un vrai sujet dans ce milieu qui était très à la marge. Les artistes sont de plus en plus conscients de leurs droits et c’est tant mieux !

 

Plus d’informations sur bien-urbain.fr


En savoir plus sur la Révélation Art urbain 

À télécharger

Esquisses n°34

Lettre d'information de l'ADAGP - n°34 - janvier 2024

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