5. Pour la mise en place de dispositifs favorisant l’acquisition d’œuvres d’artistes vivants de la scène française

14 juin 2022

En 2022, l’ADAGP soumet 9 propositions pour la scène artistique française, à destination du nouveau mandat présidentiel, des députés et du nouveau gouvernement.

Enjeu n5 : Mise en place de dispositifs favorisant l’acquisition par les particuliers et les professions libérales d’œuvres d’artistes vivants de la scène française

 

En France, en 2017, 1 Français sur 4 se disait favorable à l’idée d’acquérir une œuvre d’art contemporaine chez lui. L’incitation des particuliers et des professions libérales à acquérir des œuvres d’artistes de la scène française actuelle pourrait prendre la forme de deux dispositifs :

 

  • L’introduction d’un dispositif plafonné de défiscalisation ;

La création d’un dispositif de défiscalisation plafonné permettrait de soutenir les artistes (des beaux-arts, mais aussi les auteurs de BD via les ventes de planches originales de BD qui constituent un revenu complémentaire conséquent pour leurs auteurs) mais également les galeries dans leur travail de valorisation de la scène contemporaine française.

La défiscalisation s’appliquerait uniquement au 1er marché.

 

Objectifs :

 - mise en place d’un système de déduction d’impôt sur le revenu pour les particuliers sur la base de 60 % du montant de l’achat (dans la limite de 10 000 €),

 - intégration du dispositif dans un plafonnement global des avantages fiscaux à 20 000 € (le plafond pour les investissements Sofica et Pinel sont plafonnés à 18 000 €),

 - durée du dispositif : 5 ans,

 - critères : artiste vivant de la scène française (Français ou ayant sa résidence principale en France depuis 5 ans) ; achat dans une galerie française (sur le territoire français) ; la galerie doit garantir le reversement de la part due à l’artiste dans les 3 mois ; dispositif ouvert aux particuliers et aux professions libérales.

 

Le coût d’une mesure de défiscalisation d’achats d’œuvres d’art

En se basant sur le nombre de foyers investissant dans le dispositif Pinel (moyenne de 35 000 dossiers/an) et de ceux investissant dans les placements Sofica (7 500), la base moyenne annuelle d’achat d’œuvres d’art bénéficiant du dispositif de déduction d’impôts pour l’achat d’œuvres d’art serait :

 - fourchette haute : 10 000 achats à 10 000 € x 6 000 € (déduction d’impôts) = 60 millions €,

 - fourchette basse : 5 000 achats à 5 000 € x 3 000 € = 15 millions €.

Le plafond de 10 000 € est entendu hors taxe.

Sachant que les critères du dispositif imposent l’achat en galerie française, la TVA à 20 % s’applique, soit un gain pour l’État de :

 - fourchette haute : 10 000 achats à 10 000 € x 2 000 € (20 % TVA) = 20 millions €,

 - fourchette basse : 5 000 achats à 5 000 € x 1 000 € (20 % TVA) = 5 millions €.

Soit un coût total pour l’État compris entre 10 millions € (fourchette basse) et 40 millions € (fourchette haute).

À terme, la taxe sur les plus-values viendrait également pondérer le coût (plus de ventes donc plus de reventes donc plus de taxes sur les plus-values).

 

  • L’élargissement du périmètre du pass Culture.

Le pass Culture, créé par le ministère de la Culture, est une mesure mettant à disposition de tous les jeunes de 18 ans (et qui sera élargie aux jeunes de 15 à 17 ans à partir du 1er janvier 2022), la somme de 300 € pendant 24 mois pour découvrir et réserver des propositions culturelles de proximité et des offres numériques. Une plateforme professionnelle est mise à disposition des acteurs culturels en France métropolitaine et en Outre-mer, leur permettant de proposer des offres artistiques et culturelles à destination des jeunes.

Les domaines des activités éligibles sont déterminés par arrêté de la ministre de la Culture : musées, patrimoine culturel et centres d’art, spectacle vivant, cours, ateliers ou activités de pratique artistique et culturelle, cinéma, audiovisuel/vidéo, musique, instruments de musique, livres, presse, jeux vidéo, dédicaces, rencontres, conférences culturelles, ateliers de médiation culturelle et matériel arts créatifs.

À ce jour, les galeries ne semblent donc pas éligibles au dispositif, ce qui conduit à penser que le pass Culture ne permet pas à ses bénéficiaires d’acquérir d’œuvres d’art. Pourtant, les conditions générales d’utilisation de l’application prévoient bien la catégorie beaux-arts au titre des catégories de professionnels éligibles.

L’introduction des galeries françaises dans le dispositif permettrait à des jeunes de 18 ans d’acquérir des œuvres d’artistes vivants de la scène française, telles que, par exemple, des lithographies, beaucoup d’entre elles étant accessibles à des prix relativement faibles.

 

Objectif :

 - modification de l’arrêté du 20 mai 2021 pour intégrer les galeries d’art dans la catégorie des professionnels concernés par le pass Culture.

 

>> Voir l’enjeu précédent Pour la création d’une obligation de production et de diffusion de programmes audiovisuels sur les arts visuels

 


Pourquoi 9 enjeux pour les arts visuels ?

Dans leur rapport consacré au panorama des industries culturelles et créatives en France paru en 2019, France Creative et EY ont constaté qu’en 2018, le secteur des arts visuels a généré 23,4 milliards d’euros de chiffre d’affaires, faisant de lui le premier secteur culturel français (devant la musique et le cinéma qui ont respectivement généré 9,7 et 3,8 milliards d’euros de chiffre d’affaires).

Pourtant, des études récentes montrent que les financements publics consacrés aux arts visuels ne sont pas toujours représentatifs du poids de ce secteur dans la culture. À titre d’exemple, en 2019, les communes n’ont alloué que 2 % de leurs dépenses culturelles aux arts plastiques.

Il est par ailleurs rappelé que les artistes des arts visuels ne bénéficient pas du mécanisme de soutien protecteur des artistes que représente le régime de l’intermittence et que la multitude de TPE du secteur des arts visuels, constituant un élément essentiel du maillage territorial, a été très fortement touchée par la crise sanitaire et les confinements qui en ont découlé. Une fois encore, les arts visuels ont été le parent pauvre de la politique de relance, se voyant attribuer 13,1 millions d’euros, soit seulement 3 % des crédits consacrés au redressement de la création.

Dès lors, plus que jamais, l’ADAGP interpelle les pouvoirs publics et soumet des propositions de soutien de la scène artistique française, pour la plupart issues de mesures qui ont fait leurs preuves dans d’autres secteurs culturels et dont le bénéfice pour les créateurs concernés n’est plus à démontrer.